Thème : le leadership de la femme enseignante en période de crise sanitaire de la Covid 19.
Exposé de *Prof Dr Berthe Zinga ILunga*
Présidente CSK bertzinga@yahoo.fr
* » Pour une vision féministe du leadership… »*
Avant de vous présenter rapidement le Cercle Sophie Kanza, association des femmes professeures d’université en République Démocratique du Congo, qui est à l’initiative de l’activité de ce jour, permettez-moi de faire un clin d’œil à une actualité heureuse et encourageante –et bien rare pour être soulignée- dans le paysage politique africain. Elle constitue sans aucun doute un pas en avant dans le long cheminement semé d’embuche, vers le leadership féminin.
En effet, l’évolution des mentalités et des comportements dans le domaine politique, incarnation du pouvoir par excellence, et par ricochet du leadership, est d’autant plus lente en Afrique que je voudrais me réjouir, avec vous, de l’arrivée à la tête de la République de Tanzanie, de Madame Samia Saluhu Hassan. Merci… Revenons donc à notre préoccupation. Le coronavirus d’abord !
Voilà ! Depuis un peu plus d’une année, le monde vit un traumatisme majeur qui procède de l’irruption de la pandémie du Coronavirus, Covid-19. Voici donc un élément microscopique qui vient tout bouleverser. Il a causé d’importantes pertes de vies humaines, engendré une brutale récession économique, provoqué un confinement planétaire et impose indistinctement le port des masques aux habitants de la Planète.
Des esprits se lèvent partout pour proclamer qu’il faut profiter de la prise de conscience collective provoquée par cette crise sanitaire du COVID-19 pour revenir sur des dogmes, et mieux se préoccuper du vivant, de la santé, des liens sociaux…bref du capital humain.
Vivier de la connaissance, l’Université est précisément le centre par excellence de production du capital humain.
Personnage central de l’institution universitaire, le professeur (pardon mesdames, ne m’en voulez pas de ne pas le décliner au féminin), le professeur disais-je, au sens large du terme, est un acteur majeur du développement national, notamment du fait des liens entre sa mission de formation des jeunes et l’avenir du pays.
L’histoire nous enseigne cependant qu’un peu partout dans le monde, l’accès des femmes à ce métier n’a pas été une évidence. Monde d’hommes, pensé par et pour les hommes, l’Université reproduit tout naturellement des inégalités observées dans la société, ainsi que des stéréotypes sexués qui y sont véhiculés. Soixante ans après l’accession de notre pays à l’indépendance, on dénombre à peine une centaine de femmes professeures sur un total d’environ 1500.
À l’Unikin, les statistiques de mars 2019, renseignent un total de 67 femmes professeurs sur un total de 1031 professeurs, soit 6,5%.
L’histoire de la création de CSK remonte à la fin de l’année 2009, lorsque
profitant du courant international issu de la manifestation de l’intérêt aux problèmes posés par le genre, les femmes professeures d’université en RDC ont induit des contacts qui ont permis une identification aisée des convergences et des solidarités, et accompagné la naissance en 2010 du Cercle Sophie Kanza, CSK, du nom de la première congolaise diplômée et professeure d’université.
Les objectifs de l’association s’articulent principalement autour de l’équité du genre, considérée comme l’un des critères de crédibilité de toute action du développement, de la promotion du savoir des femmes dans le domaine de la science et technologie, et de la participation des femmes professeures au renforcement de la capacité contributive des femmes de tous les horizons au développement national. Voilà donc pour notre Association !
Concernant notre thème du jour, l’on observe alors que la pandémie de la Covid-19 se maintient à travers le monde, sa survenance expose la plupart des Pays en Développement, et singulièrement les pays africains à de grands risques, aussi bien sur le plan sanitaire que sur les plans économique, social, sécuritaire et humain.
Ces risques, provoqués par la Covid-19 ont accru les inégalités existantes entre les genres en matière d’opportunités de travail et économiques particulièrement dans le secteur informel.
En République Démocratique du Congo, comme dans l’ensemble des pays d’Afrique Subsaharienne, les femmes, majoritaires dans le secteur informel, sont durement touchées par la crise du coronavirus.
C’est pourquoi, suivant le thème de la Journée Internationale des Femmes, notre Association a fait le choix d’aborder la question du leadership de la femme en période de cette crise du coronavirus Covid 19.
Les différentes intervenantes vous en feront la démonstration à travers des thèmes concrets.
Il m’a paru toutefois judicieux de tenter d’expliciter la notion du leadership et de sa vision féministe en m’inspirant notamment de Sarah Saint Michel, économiste, maître de conférences à l’Université Panthéon-Sorbonne et de Madame Fanny Benedetti, directrice exécutive de l’ONU Femme en France. En accord avec d’autres auteurs, elles définissent le leadership comme étant la capacité d’un individu à fédérer, influencer et conduire un groupe dans le but d’atteindre des objectifs communs.
Concrètement avoir du leadership c’est être capable de communiquer une vision positive et inspirante du futur, et de susciter motivation et engagement auprès de ses collaborateurs. Chaque individu a une capacité à influencer un collectif.
Les études soulignent qu’il y a une part d’innée dans l’acquisition du leadership, entre 20 et 30 %. Cependant, près de 70 % du leadership s’acquiert au fil du temps, des expériences et de l’apprentissage par l’action.
Allons-y mes chères collègues, si on envie d’être leader une leader, c’est plus que possible !
Pour ce qui est de la vision féministe du leadership, certaines auteures estiment qu’elle permet l’affirmation d’une liberté individuelle et d’une capacité collective de réinventer le pouvoir au service de toutes et de tous, de recréer du débat et du lien.
Cette réinvention passe par un récit et un agenda constructifs, une gouvernance et un leadership inclusifs et coopératifs. C’est un style, une manière de gouverner qui gagnent du terrain, qui ne sont pas dominateurs, descendants.
C’est un leadership combatif, exigeant, mais aussi respectueux des adversaires, bienveillant, participatif et ouvert.
Vive les femmes!
Mais voyons donc! Quelques questionnements taraudent tout de même notre esprit féministe…
Alors que de manière quasi identique, les études indiquent qu’il n’existe pas de différences majeures entre les femmes et les hommes en matière de leadership, pourquoi l’idée que les femmes et les hommes seraient des leaders avec des qualités différentes est-elle très répandue ? D’où vient l’idée selon laquelle il existerait un leadership masculin considéré comme autoritaire, dominant et directif ; et un leadership féminin défini comme collaboratif, bienveillant et axé sur la communication ?
Voyez-vous ! Notre société, j’ai failli dire la société des hommes, cultive depuis les temps immémoriaux des freins majeurs faits notamment des stéréotypes sexués qui pèsent toutes les questions, y compris bien sûr celle du leadership.
Je préfère vous faire grâce de mes récriminations de féministe… je laisse donc le soin aux différentes intervenantes d’apporter la contradiction… par des éléments susceptibles de démontrer si le leadership au féminin est, comme le pensent des féministes, l’aptitude à être efficace, à pouvoir changer le monde, bref à faire la guerre au coronavirus Covid 19…pour emprunter à une expression chère au Président français Emmanuel Macron.
Avant de conclure mon propos, permettez-moi d’exprimer mes sentiments de remerciements à nos partenaires, la Fondation Nicole NTUMBA BUATSHIA, FONIB, à Mani Tech et au Théâtre Sentinelle, 2 structures appartenant à des jeunes femmes entrepreneures dynamiques et les derniers et pas les moindres, l’ONU Femmes et le Ministère du Genre, famille et Enfant.
Je vous remercie.